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Quand la loi est injuste la désobéissance est un droit ?

Récemment introduite au front de la scène à travers diverses actions militantes, la désobéissance civile reste, encore aujourd’hui, un moyen d’action. De Antigone à la Rébellion d’extinction, Henri-David Thoreau à Willy Peers, la désobéissance civile a toujours été un outil pour montrer un désaccord avec un système, une politique. Son utilisation actuelle, notamment dans le contexte de différentes luttes climatiques ou de l’hébergement des personnes en migration, remet son utilisation au centre de l’attention. Cependant, l’action politique ne doit pas être confondue avec toute autre forme de désobéissance.

Droit naturel ou droit positif ?

Dans la philosophie du droit, deux conceptions différentes sont souvent comparées : le droit positif et le droit naturel. Alors que la première représente une lecture stricto sensu du droit que nous connaissons dans un État : constitutions, lois, décrets, etc., la seconde est une conception idéale du droit, y compris des lois universelles, intemporelles et inhérentes à tout être humain. Aristote, par exemple, considère que le droit naturel est supérieur et fait partie de la nature des choses. Ces deux conceptions du droit permettent de mettre en évidence la possibilité de lois « mauvaises » ou injustes : une loi dérivée du droit positif peut sembler incompatible avec une autre loi plus idéale. Prenons comme exemple toutes les lois sur les migrations confrontées à la liberté de circulation consacrée par la Déclaration universelle des droits de l’homme. Certaines lois consacrées par le droit positif peuvent donc nous paraître injustes, ce qui offre à chacun la possibilité de ne pas être d’accord avec elles et donc de les désapprouver ou même de les désobéir.

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«  Les lois sont nécessairement bonnes ou mauvaises, c’est-à-dire justes ou injustes.  » Aristote, Politique, Livre III

Principes fondateurs de la désobéissance civile

Pour ne pas commettre d’erreurs, il semble essentiel de comprendre ce qui distingue l’action de désobéissance civile de tous les autres types d’actions démocratiques, comme le droit de protester, par exemple.

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Plusieurs les principes entrent en jeu (1) :

  1. Action collective : La désobéissance civile se distingue des actions individuelles telles que l’objection de conscience, par exemple. L’action doit être organisée et concertée en groupes.
  2. Action publique : un acte de désobéissance civile se fait toujours avec un visage ouvert. C’est un acte de communication et son caractère public lui confère sa valeur politique. Son aspect public permet également aux désobéissants de mettre en évidence les principes éthiques sur lesquels repose leur action.
  3. Une action non violente : la violence est régulièrement utilisée pour discréditer les manifestants. En outre, la violence est également utilisée à des fins politiques telles que les cambriolages et les affrontements avec la police lors de certaines manifestations, par exemple. C’est en cela que la non-violence est au centre de la désobéissance civile : désobéir de manière civilisée pour ne pas être discrédité.
  4. Une action coercitive : l’objectif n’est pas seulement de dénoncer une problème, il est également de veiller à ce que l’état est obligé de modifier la loi.
  5. Une action à long terme : l’ État ne peut se permettre de réagir de façon disproportionnée à une action qui est censée être non violente. Si la non-violence est la condition d’une lutte pour durer, c’est le moment où ce combat aura lieu qui fera entendre les revendications et éventuellement changer la loi.
  6. Une action qui prend le risque de châtiment : lorsque nous enfreignons la loi pour la rendre meilleure, nous ne pouvons qu’accepter de faire face aux conséquences de ces actes. C’est la façon dont le juge de justice jugera l’action qui permettra aux désobéissants d’acquérir de la visibilité avec une éventuelle couverture médiatique, de rendre l’opinion publique en faveur de l’affaire défendue, de modifier l’interprétation de la loi en changeant la jurisprudence, même en se posant entre les mains du législateur et à faites-le. en termes concrets évoluent la loi.
  7. Action constructive : ce est la clé de la désobéissance civile. En plus d’analyser, de critiquer et de s’opposer à un problème, il est également nécessaire de proposer des alternatives, de défendre de nouveaux droits, etc. Le refus d’obéir à une loi jugée injuste et les solutions proposées sont les deux côtés d’une même médaille.

Droit ou devoir ?

En France, la Déclaration des Droits de l’Homme et des Citoyens de 1789 place le droit à la résistance à l’oppression dans le droit naturel (2). Un acte de désobéissance civile peut équivaut à une résistance à l’oppression, lorsque la loi devient mauvaise. Mais ce droit s’est transformé en devoir, surtout au procès de Nuremberg, de juger les criminels nazis : lors de ce procès, la responsabilité personnelle a été instituée avec l’impossibilité de se cacher derrière l’obligation d’obéir. Plus l’irresponsabilité criminelle des subordonnés obéissant aux ordres, bonjour la jurisprudence encourageant la désobéissance à une loi injuste. Si, dans certains cas, l’obéissance aux ordres peut être considérée comme un acte de soumission aveugle, alors la désobéissance peut clairement apparaître comme un acte citoyen.

« Si la machine gouvernementale veut faire de nous l’instrument de l’injustice envers notre voisin, je vous le dis, enfreindre la loi. Laissez votre vie un contre-frottement pour arrêter la machine.  » Henri-David Thoreau, Désobéissance civile

Une crise de la démocratie

Manuella Cadelli, présidente de l’Association Syndicale des Magistrats, tente d’identifier les raisons pour lesquelles les membres d’une société ont recours à des actes de désobéissance civile. Pour elle, ces actes se produisent lorsque les gens ne trouvent plus de réponses dans les moyens traditionnellement mis à leur disposition par l’État, comme cela a été très bien démontré dans l’après-guerre. A cette époque, plusieurs contre-pouvoirs et instruments de dialogue ont été mis en place pour changer la démocratie : le renforcement des contre-pouvoirs tels que les syndicats et les investissements dans le système judiciaire ont permis, entre autres, aux gens d’avoir des outils pour canaliser les problèmes qu’ils face. Le magistrat dit : « Nous pouvons donc, collectivement, désobéir à une loi grâce au travail du juge qui, depuis la libération, a été rendu très constructif et légitime sur la base d’un principe général : jamais plus jamais. La justice est le droit d’avoir des droits » (3). Il a ajouté : « Ce qui manque actuellement, c’est une justice efficace, efficace et accessible à tous. En priorité, au lieu de donner à chacun un droit individuel à la désobéissance, il faut investir pour approfondir la démocratie » (4). En utilisant de plus en plus la désobéissance civile comme moyen de pression, on peut raisonnablement penser que les gens se sentent de moins en moins représentés par les organes législatifs et ne voient plus la justice comme la solution au problème.

Un exemple belge : Kleine-Brogel

C’ est le topo : la base militaire de Kleine-Brogel abrite des armes nucléaires américaines. Tout le monde le sait, mais aucun gouvernement ne l’a reconnu publiquement (5). Mili-tants dénoncer la possession de ces armes et organiser des incursions sur le site militaire. Ils violent donc la loi qui dénonce le danger pour la sécurité et la paix, appellent au retrait des armes nucléaires de Belgique et à une transparence totale de la part des autorités (6). Ici, nous trouvons tous les éléments constitutifs de la désobéissance civile.

Constatation

Est-il possible d’imaginer une démocratie sans remettre en question, sans vigilance de la part de ses citoyens et donc sans possibilité de désobéir ? Évidemment pas. Mais certains militants et militants refusent les approximations et organisent leur action selon des critères bien définis. La désobéissance en tant qu’outil politique oui, mais cela doit être encadré par des principes permettant aux acteurs d’en faire des actes de désobéissance civile, d’être crédibles et d’obtenir l’opinion publique. Et nous pouvons dire qu’ici, qu’il s’agisse de protéger un bac à sable à Arlon ou d’empêcher les migrants de dormir dehors, jeunes et grands se sont magnifiquement appropriés cet outil démocratique et citoyen.